mercredi 25 août 2010

Sur le banc


Passage éclair à Paris pour dépaqueter les tongs de Mademoiselle, sortir ma housse d’automne, me dépoussiérer le cordage et… passer à la radio. Sur une station intelligente, oui monsieur, sur France Culture. J’aime bien le nom de l’émission aussi : Sur le banc. Ca me parle ça, c’est vrai que la vie est faite d’une succession de bancs. Le banc du parc où l’on te surveille du coin de l’œil quand tu en es encore à marcher tout banc-al, le banc de l’école où tu rêvasses, le banc des accusés (je vous ai racontés déjà, non ?), les dé-banc-dades quand tu t’enflammes d’un battement de cil, les bancs de mariage quand tu te résignes (ou là là c’est moche cet esprit désabusé… mea culpa, je gomme), la banqueroute qui nous guette nous les musi-bohémiens, le banc d’un métro qui nous a fait traverser tout Paris avec Marine sur talons hauts (puis pieds-nus sur le trottoir tant ses orteils récalcitrants font de la résistance) … et celui de la maison de la radio où je me demande à quelle sauce je vais être jouée.

Tiens, on commence par moi pour une fois. Je m’accorde à faire mon mieux et interprète deux de nos chansons. Hop hop dans la boîte et blablabla, elle parle et ça donne ça :

 http://www.franceculture.com/emission-sur-le-banc-sandra-reinflet-2010-08-23.html

dimanche 22 août 2010

Le GPS c'est complètement has been

Pour faire Barcelone – Paris on peut :

a) Prendre un vol low-cost orange (cf. article du 7 août). Durée moyenne : 3h
b) Prendre un train de nuit et roupiller bercés par l’odeur délicate des pieds de notre voisin d’à côté (puisque évidemment ses petons taille 46 pendouillent au milieu du couloir). Durée moyenne : 11h
c) Faire du covoiturage et en parler pendant la moitié du trajet (puisque cette pratique écolo est tout de même notre principal point commun). Durée moyenne : 10h
d) Faire Barcelone-Aix en voiture, Aix-Nice puis Nice-Cannes en train, Cannes-Aix en covoiturage, Aix-Royan en voiture, Royan-Saumur puis Saumur-Paris en train. Durée moyenne : 34h

Vous vous doutez bien qu’en toute logique nous avons opté pour le dernier choix. Notre amie Camille, organisatrice du Busker’s festival, quitte Barcelone avec sa jolie Twingo rose, après six ans de relation fusionnelle. Mes cordes, Marine et moi avons donc décidé de la soutenir un peu dans cette épreuve. Nous lui avons écrit une chanson tout d’abord (vidéo dans le post du 10 août), avons chargé son coffre (enfin surtout elle) P et avons embarqué pour un Road-trip en zigzag.

Après six heures d’embouteillages entre Barcelone et Aix, dont quelques balades à pieds sur l’autoroute, une petite danse improvisée sur The time of my life dans une station service, Camille nous lache à Aix TGV pour le week-end. RDV lundi matin. D’ici là je fais ce que je veux (enfin surtout ce qu’elle veut puisque malheureusement je n’ai pas vraiment ma note à jouer)… Nous avons hésité longtemps, mais finalement, sommes parties à Nice retrouver des amis et prendre un peu de soleil… C’est ce que je pensais jusqu’à ce que samedi matin, une pluie torrentielle nous réveille. Il paraît que cela arrive trois jours dans l’été. C’est plus rare que les feux d’artifices, mais chanceuses que nous sommes, NOUS Y ETIONS ! En même temps, heureusement. Le soleil, la peau bronzée et luisante, c’est dépassé tout cela, c’est comme les GPS.

Oui, parce que ma chère co-pilote et moi-même nous retrouvons donc comme prévu lundi matin pour rejoindre Royan, où nos chemins doivent se séparer. Après 4 petites heures de sommeil, nous nous apprêtons à passer une journée merveilleuse ensemble, à surfer sur le bitume, guidées par une carte du 20ème siècle où les autoroutes sont encore tracées en pointillés. Début du périple, un retour du 15 août sur l’A8. Verdict : 4 heures pour faire Aix-Montpellier. Aventurières dans l’âme, nous bifurquons vers Millau. Quitte à ne pas avancer, autant que le paysage soit joli (souvenez-vous de cette merveilleuse chanson de Barbelivien, «quitter l’autoroouuuute… » , n’oublions pas qu’il s’agit d’un blog à vocation musicale;).

A nous les petites pauses barbotage au bord des lacs, les petites pauses déjeuner, les petites pauses pipi, les petites pauses goûter, les petites pauses essences, les petites pauses photos, on fait des pauses, des petites pauses, encore des petites pauses… Verdict 2: 14h de route pour rejoindre Royan, de nuit, crevées mais mortes de rire. A défaut d’avoir le sens de l’orientation, nous avons le sens de l’humour, et ça, ça vous sauve un road-trip. 

à 16h, on a un peu appuyé sur le champignon...
Et puis, il y a eu une montée...

jeudi 19 août 2010

À l’abordage avec Jack Sparrow

Deuxième jour au Busker’s festival. Nous partageons l’affiche avec Solrise, un groupe qui fait à peu près la même chose que nous (soit un reggae rock roots). Ils ont un matériel de pro, une énorme banderole exhibant leur nom et des enceintes qui envoient la purée (le bois, ou je ne sais quoi, mais qui l’envoient loin). Marine et moi nous sentons un peu seules au milieu de tout ça, mais au moins le son est-il excellent. Pas mal de gens s’arrêtent pour nous écouter. Parmi eux, un monsieur tout nu qui se plante devant nous comme si de rien n’était (test de concentration ultime), un fan qui a fait s’éterniser une séance photo pour le plaisir de coller sa joue luisante le plus longtemps possible contre celle de Marine, des grand-mères qui hochent la tête en signe d’approbation (rock n’roll), des punks qui passent leur chemin sans un battement de piercing (pas rock n’roll) et notre fan numéro un, un beau conducteur de taxi-vélo qui a assisté à nos trois sets en entier (et comme il est tatoué de partout, cela nous fait repasser du côté rock n’roll). Un joli moment donc, avec qui plus est, un vrai pied de micro… Grosse évolution technique nous permettant de nous déhancher un peu, sans toutefois arriver à la cheville du chanteur qui nous précédait.

Ce sosie de Johnny Depp dans Pirates des caraïbes a en effet enflammé la Rambla à coup de danse suggestive. Après le concert et quelques verres, il était un peu moins glam (cf. photos by night). Ceci dit, ayant nous aussi terminé assises sur un trottoir comme les adolescentes attardées que nous sommes (parfois/rarement), nous serions malvenues de nous en moquer. Du coup le lendemain, nous décidons de laisser une nouvelle chance au capitaine de notre soirée. Verdict : 4 jours à dessiner, gratouiller et chanter avec lui. Preuve qu’entre Marine et le reggae, il n’y a qu’un papier de cigarette roulée. 

Pendant...

Après...
Et d'autres photos du festival en vrac

Et notre ami Tim, public assidu et fervent défenseur de la cause animale. Il nous aura presque rendues vegan (deux jours).

mardi 10 août 2010

Le pied trop laid


Au contraire de la plupart des français qui errent à Barcelone en cette période estivale, nous ne sommes pas venues trouver un mètre carré de plage libre pour poser notre serviette, ou pour sortir de bar en boîte jusqu’au petit matin, jusqu’à ce que les seuls sources d’alcool disponibles soient celles des pakistanais revendeurs de bières fraîchement sorties des trottoirs (parce que pour les garder au frais ils les planquent sous des plaques d’égout – ant).

Non non non, Marine et moi sommes venues travailler, avec tout le sérieux qui nous caractérise (…). Un festival de rue, le Busker’s festival, nous a programmées vendredi et samedi. 50 minutes deux fois par jour. Jusque là pas de problème. Sauf que, évidemment, j’arrive les cordes vides, sans rien pour me brancher, et que Marine doit compter sur la gentillesse des groupes avec lesquels nous partageons les scènes pour pouvoir nous raccorder à un ampli.

Nous arrivons donc au point d’accueil où l’on nous présente notre « co-groupe » du jour, un duo de blues italien baptisé Village H. Ils ont roulé dix heures pour jouer ici et espérer gagner un peu d’argent grâce à la générosité des passants (c’est le concept du festival). Un peu coupable d’être venue en avion et les mains dans les poches, Marine leur explique notre problème. Adorables, ils acceptent immédiatement de nous prêter leur matériel (elle avait forcé sur le mascara effet yeux de biche pour appuyer sa demande). Sauf qu’ils jouent en instrumental et n’ont donc pas de pied de micro… Mac Guyver en puissance, Hervé, l’harmoniciste du groupe, a l’idée ingénieuse de fixer le micro au trolley qui leur sert à porter l’ampli. Un tendeur, du gaffeur, et la mission est accomplie. Nous avons un peu l’air de romanos avec tout ce fatras, mais Marine sort ses talons pour compenser (bien qu’ils soient plutôt aiguilles) et l’illusion prend. Un grand merci à nos sauveurs du jour avec lesquels nous avons même partagé quelques trios mémorables.

Une vidéo preuve à l’appui de l’installation – la chanson Camille C, justement écrite pour l’amie qui nous a invitées à ce festival – et quelques photos souvenirs de ce joli moment au bord de l’eau.




samedi 7 août 2010

Low cost-ing et bluff-ing

A Berlin, nous avions voyagé avec Air France. La classe nationale. Un vol à l’heure, une parfaite considération de ma personne («de ma chose» serait plus correct peut-être, mais, comme toute guitare qui se respecte, je suis un peu mégalo), Marine avait même pu changer notre date de retour sur le seul motif qu’elle était amoureuse (notion relative pour le cœur de ballon qui lui sert de moteur - cf. Forever 24h). ¨Preuve que notre compagnie cocorico en a un de cœur (ou une bonne politique de management de la relation client, au choix).

Ce matin, Marine m’a annoncé un départ avec une nouvelle compagnie au nom prometteur : Vueling. Je me voyais déjà choyée par des hôtesses bling bling, pleines de bon feeling, nous offrant du Riesling (la rime en english speaking n’est pas ma spécialité). En fait, c’était plutôt limiting, starving et… waiting.

Deux heures dans la salle d’embarquement. En ne sachant même pas si je pourrai monter à bord. Cette compagnie fait du racisme primaire avec les guitares. Marine avait eu beau prendre un excédent de bagages pour laisser ses (minis kilos) de fringues d’été en soute et me prendre avec elle, ils demandent que nous payions un «extra seat» (un siège supplémentaire) pour moi. Comme si j’allais commander un petit café et taper la discut’ avec les hôtesses, bien attacher ma ceinture avant le départ et écraser mon siège sur les genoux de mes voisins dès le signal éteint… Comme si je n’avais pas la taille de guêpe qui sied à une guitare de mon rang et que je ne pouvais pas tenir dans les compartiments.

Elle et moi nous concertons et décidons qu’il n’en est pas question. Quitte à payer plus, on aurait voyagé avec notre compagnie préférée, celle qui nous dessine des petits cœurs dans la mousse de café et me regarde comme si je détenais quelque formule magique entre mes cordes (tournure lyrique pour dire qu’elle me porte  autant d'attention qu'un chat à une salade verte).

Marine demande donc à voir un responsable pour lui expliquer que nous avons un concert in-ra-ta-ble – la plage de Barcelone étant une sorte de Bercy en plein air, vous l’aurez compris - et qu’elle m’a toujours prise en cabine avec elle. Le type comprend qu’elle ne va pas lâcher le morceau de bois comme ça et finit par abdiquer en disant que nous négocierons directement dans l’avion mais que devons nous préparer à ce que l’accès me soit refusé. Cause toujours, qu’on se dit en notre fort intérieur.

Madame. Ceinture. Panier. Bip bip. Votre bracelet... C’est bon allez-y.

On rentre en salle d’embarquement. Comme notre avion a changé d’avis et ne veut plus partir, nous devons en attendre un autre qui est encore en Espagne. Nous en profitons pour répéter pour le concert de ce soir (pas fort, on est bien élevées quand même). Le moment fatidique arrive finalement assez vite. Ni vues ni connues, nous entrons toutes les deux dans l’appareil. Tête haute, regard fier, tout est une question de confiance en soi… Sauf que l’hôtesse nous stoppe illico :
« - Avez-vous un extra seat pour votre guitare ?
- Euh… Non mais à l’enregistrement on m’a dit qu’exceptionnellement, je pourrai la prendre avec moi. Je n’étais pas au courant. Enfin, vous voulez qu’on les appelle pour qu’ils vous le confirment ?
- Ce n’est pas normal. La politique nous oblige à vous faire payer un supplément.
- Vous devriez vous mettre d’accord avec l’équipe au sol parce qu'ils m'ont dit qu'ils étaient d'accord.
- (soupir) bon... allez-y. Mais c’est vraiment exceptionnel. La prochaine fois, ça ne passera pas. »

Le bluff ou la guitare ? En tout cas, ça y est nous sommes à Barcelona et ça, ça me fait décoller de joie.

jeudi 5 août 2010

Love @ (presque) first sight


Je suis née aux Etats-Unis, mais je ne les ai jamais vus… Mon rêve américain est bien loin. Il paraît pourtant que le destin d’une guitare folk est de parcourir la route 66, de faire gigoter les bottes des femmes crescendo en dessous des tables jusqu’à ce que les vibrations leur montent aux genoux et qu’elles se lèvent d’un bond pour exhiber leurs jupons. Il paraît aussi que j’aurais le pouvoir de faire pleurer les hommes et de les attirer dans les miens. Enfin, façon de parler. C’est ce que disaient les autres guitares, celles de la boutique. A longueur de journée elles minaudaient dans leur rack, comme des petits chiots dans un magasin pour qu’on les adopte. Je n’en pouvais plus de voir leurs cordes s’exhiber du matin au soir et prétendre qu’une grande carrière les attendait. Et vas-y que je me la raconte avec mon petit son vintage, mon acoustique incroyable ou mes illustres ancêtres. Moi je porte un nom inconnu au bataillon : Breedlove. C’est joli, ça sonne bien fifille, je crois que ça me ressemble. Ma marque a été créée par un fondateur de Taylor, ce qui est censé me fournir un sérieux pédigrée. Mais bon, personne n’est vraiment au courant. Sauf le vendeur du magasin qui m’a-do-rait (à moins que ce n’ai été l’inverse tant il avait l’air pressé de se débarrasser de moi). Il me posait sur les bras de chaque personne qui franchissait la porte et je devais me laisser faire sans broncher par des mains baguées et tatouées qui me claquaient comme un tambourin, des doigts de geek transpirants et tremblotants à l’idée de jouer devant le seul public du magasin, ou des guitar-heroes qui me faisaient vibrer puis me reposaient sans ménagement… J’ai bien cru que ma vie se résumerait à cette succession d’essais infructueux.

Jusqu’au jour où elle est arrivée. Une jeune femme brune, qui parlait fort et riait encore plus fort. Elle a essayé plusieurs guitares : une minuscule beaucoup trop fashion pour être sincère, une grosse caisse noire, soi-disant la même qu’une chanteuse connue dont je n’avais jamais entendu parler. Et puis soudain, elle s’est décidée à m’essayer. Une chance. Je n’avais qu’une chance pour la convaincre de m’embarquer avec elle. J’ai tout donné – aidée qui plus est par le laïus du vendeur sur mes performances exceptionnelles. Je ne suis pas connue, pas utilisée par je ne sais quelle star de la folk, mais je suis pleine de bonne volonté, toute douce avec mon bois satiné, et en toute modestie, je suis bonne. Ben ouais les filles, il faut se le dire parfois. Et au bout de ses doigts, naissait pour moi l’espoir d’enfin aller au-delà de ces rayons croulant sous la concurrence… Elle m’aimait bien je le sentais, et pourtant, elle hésitait. Pas le genre de fille à se mettre la corde au cou sans réfléchir, à s’engager à la légère. Elle jouait d’ailleurs beaucoup plus timidement qu’elle ne parlait. M’effleurait seulement. J’avais envie de lui dire « allez, vas-y, branche moi, secoue-moi, fais-moi mal… ». Rien à faire, elle n’osait pas. Je sentais bien qu’elle n’était pas très expérimentée, mais avec elle, je me sentais l’âme initiatrice. J’avais envie de la guider dans ses aventures musicales, et j’espérais qu’elle me guiderait tout court. Je suis une exploratrice. Pas question de rester posée dans un joli studio sans broncher. Je veux des marques d’usure, des cicatrices de voyage. Je pense qu’elle l’a senti puisqu’après deux jours qui m’ont paru éternels, elle est enfin revenue. Elle m’a prise sous son (ès) aile et m’a fait faire le grand saut. Pigalle. Waou. Ca grouille, ça pue, c’est plein de touristes. Il y en a même un qui nous a demandé une photo parce qu’on avait l’air «so french». Quelle idée aussi de porter un béret aux abords de Montmartre. Je sens que je vais devoir faire quelques mises au point avec ma nouvelle acolyte. Parce que moi j’ai du goût, de la classe, de l’élégance, de la discrétion… et une sangle en moumoute rose. La fautive s’appelle Marine Goodmorning. Enfin, c’est ce qu’elle prétend. Elle chante depuis longtemps, mais commence tout juste à gratouiller des bouts de bois dans mon genre. Elle a de grandes ambitions, veut composer avec moi et jouer à deux alors qu’avant elle ne pouvait se déplacer sans un troupeau de beaux musiciens collé à ses ballerines. Soit, je ferai de mon mieux. J’ai déjà fait de mon mieux en fait, puisque voici six mois que nous vivons ensemble. 

Nous avons déjà fait des petites scènes, des clips et elle m’a même emmené dans le métro. Pour moi, ça c’était pour les clodos. Et la voilà qui se trémousse entre deux correspondances sur talons de douze… So naïve cette fille parfois. J’illustre : Premier jour sous terrain, on jouait depuis 5 minutes quand un musicien s’est posté devant nous. Marine enflammée lui a chanté Forever 24 heures les yeux dans les yeux, trop heureuse de se sentir écoutée. A la fin du morceau, l’intéressé se contente d’une phrase : «J’ai la carte». LA carte, c’est le sésame que te donne la Ratp pour avoir le droit de jouer dans ses couloirs (parce que, oui monsieur, c’est élitiste, je dirais même que c’est la marche juste avant l’Olympia, enfin… ça c’est surtout elle qui le dit - ). Peu importe ELLE lui rétorque que NOUS aussi nous avons LA carte. Ce à quoi il répond «oui, mais moi je viens ici depuis 10 ans». Ahhh. Nous y voilà. En fait, le type nous fait une réplique de Marche à l’ombre. Il veut juste qu’on dégage. Il le dit gentiment, puisque Marine est une femme, mais il précise que, justement parce qu’elle est une femme, c’est injuste. Qu’elle va lui piquer tout le quota de succès de la station. On décide d’un commun accord (même si elle était plus d’accord que moi, comme dirait notre ami Grand Corps Malade) de nous tirer de là et d’aller faire nos gammes ailleurs. A la maison quoi, bien sagement. Pour préparer notre premier voyage de l’été : Berlin… Waou, ça c’est cool, punk, underground. C’est LA ville qu’il nous faut. Je me pare de cordes Elixir pour l’occasion. Je suis canon. Ich bin canon. Et nous nous envolons…



Une de nos premières vidéos à deux. Sur un thème que je n'approuve pas du tout, si elle me ment je me casse (en deux sur une scène, comme à la grande époque;).

Ein, zwei, drei, polizei.

Je n’en peux plus. On m’avait dit que la chanson, c’était peinard, cool, féminin… Tu parles. C’est pire que le hip-hop oui. Ca fait deux fois que nous avons des problèmes avec la police. La première fois c’était en hiver, alors que l’on tournait le clip de Tu penses quoi ? près des Champs Elysées. Apparemment, on n’avait pas le droit de se balader en petite culotte et gilet jaune dans la rue. C’était pour la bonne cause pourtant, mais le flic n’avait rien voulu savoir. Il nous avait embarquées elles et moi, à moitié à poil au commissariat. Cause du délit : exhibitionnisme. On devait vraiment être impressionnantes en dérangeuses d’ordre public, puisque pour nous y conduire, il avait grillé tous les feux, déclenché son gyrophare et sa sirène à fond. Tout ça pour s’entendre demander d’un air goguenard à l’arrivée dans le 17ème: «c’est vous l’affaire du 8?». Ben oui, c’est nous. Déçu ? Apparemment oui. Après quelques minutes l’officier s’était excusé au nom de son collègue et nous avait proposé de chanter notre chanson devant les flics de l’accueil. Avec une robe hippie en plein mois de décembre, Marine me faisait bien marrer. Je me suis dit que c’était un départ sur les chapeaux de roue mais que ça pouvait arriver.

Et voilà que, sept mois plus tard, après un petit concert acoustique de deux heures avec son (presque) célèbre correspondant musicien Luis Cozen, elle nous refait le même coup. Enfin, pas exactement. Disons qu’elle ne s’est pas déshabillée (quoi que la robe était un peu courte pour mon côté puritain) mais qu’elle a chanté pour des petites mamies dans la rue. Be kind, rewind. Ok, je reprends depuis le début.

Dans l’avion Paris-Berlin, une femme d’un certain âge, bien en chair, s’approche de nous. D’un air réjoui, elle lance à Marine : «formidable, j’avais demandé à avoir une voisine mince». Formidable, nous on n’avait pas pensé à préciser qu’une femme un peu forte serait idéal pour partager notre siège… La femme en question s’appelle Odette. Elle parle, parle, parle. A en clouer le beignet à Marine qui n’a d’ordinaire pas sa langue dans sa poche. Elle voyage avec sa copine Michèle et tout le club du 3ème âge du 18ème. Malgré le fait que l’on doive leur sacrifier notre sieste, il faut avouer qu'elles sont sympa. Attachantes. En me rangeant dans la case au dessus de leurs têtes, Marine est bien obligée de leur parler de moi. Elle leur dit que nous allons faire un concert dimanche soir dand le quartier de Kreuzberg, leur note l’adresse, n’est pas sûre de l’heure. Surement 20h ou 21h. Elles disent que peut-être, si elles peuvent s’évader de leur programme à la rigueur presque militaire, elles passeront. Elles nous souhaitent bonne chance. Une bise (chacune) et hop, on s’éclipse.
Direction Berlin, la ville, la vraie. Pleine de béton, sous la pluie. Mais la pluie tombe bien ici. Elle donne envie de s’enfoncer dans les bars, les caves, les endroits secrets dans lesquels nous conduisent nos amis. Des bars aux allures de DDR avec des placards portes secrètes, des boîtes électro dans d’anciens entrepôts… On répète pas mal, deux jours, avec notre hôte berlinois, préparons quelques duos avec lui. Et le jour J, à l’heure H (19)… dans ce petit café-concert français… personne.

Oups. Allez, une mauresque pour se consoler. Marine me pose dans un coin. Je prie pour qu’elle me reprenne en main. Ne me dites pas que nous sommes venues jusque là pour boire un Ricard ? Je me morfonds tandis qu’elle s’alcoolise. Soudain, comme par magie, le bar s’emplit, s’emplit, s’emplit… J’en ai les cordes qui frisent d’excitation. Nous allons jouer ! A peine le temps de se le dire que nous commençons déjà. Deux heures à trois (avec Lui) alternant nos compositions respectives. Le public est attentif, réactif, j’adore. J’en oublie même parfois mes petites notes. Mea culpa, ce sont mes premières fois.
Nous terminons vers 21h30. Je m’octroie une petite sieste dans ma housse… petite… très petite. Puisque Marine se pointe à peine dix minutes plus tard. Les mamies de l’avion ont traversé tout Berlin pour nous écouter. Et elles sont du coup arrivées trop tard. Il faut dire qu’à l’époque nous ignorions notre heure de passage et n’avons pas pu les prévenir.
Marine décide alors de leur faire un morceau spécial, dehors, devant le bar.

Nous commençons sous les yeux ébahis de nos grand-mères aventurières quand un bruit proche de celui du nouvellement célèbre Vuvuzela retentit. C’est fort, répétitif (insupportable est un euphémisme). Les têtes se lèvent. De son balcon, le voisin, en mauvais termes avec le bar, veut pourrir notre improvisation. Lorsque Marine le comprend, elle lui adresse une supplique en allemand, expliquant que c’est sa première fois à Berlin (elle mens, mais bon, puisque c'est le titre de la chanson en cause, admettons), que cela va durer 5 minutes et que c’est pour la bonne cause. Elle termine par un «ich liebe dich» un peu exagéré, mais tellement elle.
L’instrumentiste fou se tait. Nous terminons le morceau. Les grand-mères emballées applaudissent chaleureusement. Nous rentrons dans le bar pour enfin nous accorder une pause bien méritée quand deux policiers se pointent… Le voisin fou et fourbe les avait déjà appelés. 22h05, le couvre-feu était dépassé depuis au moins... une chanson. Ne l’emmenez pas, ne l’emmenez pas, par pitié ou je vais supplier Joe Star de m’adopter, sûre que même sa Benz benz benz m'offrirait un environnement plus tranquille.

Marine sourit, parle un allemand so franzözich qu’ils lui sourient en retour. Elle a compris l’art d’être une fille c’est sûr. Allez, ich liebe dich, et à la revoyure amis poulets.

Le clip qui nous a (presque) conduites en prison (je viens du suuuud).


Et une vidéo d'un duo avec Luis Cozen, notre super ami berlinois (http://www.myspace.com/luiscozen)