mardi 28 décembre 2010

neo-wurst


J’avais un peu dramatisé mon séjour à l’hôpital pour guitares cabossées. Un petit resserrage de boulons et un nouveau jeu de cordes plus tard et me revoilà sur pied, prête à m’envoler nach Berlin pour un concert de l’avant. Avant 2011, avant Bercy, avant quoi ? Noël ? Ah oui, j’aurais du m’en douter, tout le monde ne parle que de ça ici (l’obsession semble croître à mesure que l’on avance vers l’est).  Pile dans le thème, puisque notre spectacle se tiendra en lieu saint et sûr, sous une chapelle (transformée en théâtre, ce qui permet à la laïque guitare que je suis d’assumer cette plongée en crypte profonde).
 
Pour l’heure, ledit concert semble être le cadet des soucis de Marine. Elle engloutit des Würste et des Kartoffeln (Deutsches Buch page 26), applaudit un opéra de Stravinsky mis en scène façon néo-punk (néo est un terme à la mode - comme la chasteté - dont nous vous reparlerons). Elle tournicote dans des bals avec quelqu’un qui s’emmêle autant les semelles qu’elle (mais qui lui offre des Würste, ce qui est déjà un grand pas) et boit du Jägermeister* à avoir une haleine de bain de bouche.
*(une astérisque en haut de page a pour but de vous épargner un scroll) Le Jägermeister, Maître chasseur en allemand, est une liqueur à base de plantes médicinales titrant 35°GL.

[Pendant ce temps, je gis, seule, abandonnée dans un appartement]


Marine se souvient seulement de moi le jour J. Mieux vaut tard que jamais dit-on, mais je n’aurais jamais imaginé que son réveil sonne aussi tard. Voilà donc qu’en une journée - entamée dans l’après-midi, ne me demandez pas ce qu’elle a fait la veille – nous devons élaborer tout un répertoire. Le programmateur aimerait que nous interprétions une chanson en allemand, jamais entendue avant cela va de soi. Une histoire de roses qui pleuvent, de femme qui veut tout ou rien… Rien à voir avec le néo-romantisme de Marine évidemment.

1,2, 3, 1, 2, 3 c’est une valse. Avec un texte si long que l’apprendre nous fait tourner la tête… comme une valse. Marine achète une petite robe en dentelle beige pour détourner l’attention de ses éventuels trous de mémoire. Tenue tout à fait à propos vu les trente centimètres de neige qui recouvrent les trottoirs.Clopin-clopant en talons, elle me porte sur son dos jusqu’au Theaterkapelle. Après une dernière étape Wurst d’encouragement, nous arrivons pleines d’inspiration et de vitamines (cinq saucisses par jour, non ?). C’est parti pour une heure de concert à deux, avec intermèdes en anglais (ich habe viel vergessen…), chansons en espagnol et en japonais (easy). Néo-set international dont nous excluons néanmoins in-extremis la chanson sur les roses de peur que son interprétation achève de les faire pleuvoir. 


Next time, promis, on aura bossé notre allemand, comme un pied de néo mauvaises langues qui pensent que nous avons l’amnésie sélective. Clap clap clap, nous n’oublierons pas en tout cas ce mémorable concert. Ni notre départ de Berlin, dont la magie de noël tient parfois à des petits riens : l’explosion d’un litre de Maître chasseur en salle d’embarquement (à nos pieds on s’entend) diffusant ses effluves à qui veut les sentir, une procession sur piste enneigée pour accéder à un avion dont les ailes se font dégivrer par de petits robots (on n’a pas bu, effet de la cause).  
Quitter Berlin nous semble décidément toujours trop tôt.

lundi 22 novembre 2010

Lonely nous

Vendredi 19 novembre 2010. Théâtre de Saumur. Ou plutôt ersatz de théâtre, puisque l’original est en arrêt maladie. Une salle des fêtes parée de ses plus beaux velours tente de donner le change pendant les trois ans de travaux imposés au plus joli monument de la ville (dauphin du château au moins si l’on ne peut le couronner ainsi). Je m’apprête à accompagner Marine pour un concert programmé par la ville en première partie de Nicolas Fraissinet (ne pas connaître me semble excusable, cf. nous il y a trois jours).
 
45 minutes de set acoustique = elle + moi + 300 paires d’yeux braqués sur nous. Je flippe un peu, j’avoue. D’autant plus que je sens bien qu’elle est nerveuse, voire nostalgique ce soir. La loge est superbe, l’administration a imprimé son nom sur une photo de poisson rouge, comme s’ils la connaissaient bien. Des petites loupiottes éclairent un miroir au reflet flatteur, des chocolats, du vin local, des fruits, nous tentent les papilles. Tout se présente à merveille et pourtant, ce soir, pour la première fois, Marine se dit qu’elle aimerait partager ce moment avec ses musiciens.

Je la sens bien, toute chiffon, malgré ses chaussures panthères assorties à ma sangle (on commence à fusionner à force de promiscuité) et son maquillage laissant à peine perler les larmes qu’elle retient. C’est la première fois que nous jouons dans une salle comme celle-ci depuis que Marine a pris de la distance avec son groupe. Par peur de me vexer sûrement, elle n’ose pas me dire en face qu’ils lui manquent, mais cette date – si parfaite matériellement, bien payée pour une fois, dont elle n’a pas à assurer la communication – lui rappelle celles qu’ils ont réalisées dans leur théâtre de résidence, à Paris, il y a plus d’un an déjà.
[bulle souvenir]

La solitude est le corollaire du travail de fond qu’elle entreprend et le prix à payer pour sa liberté, elle le sait. Désormais nous parlons le même langage que nos musiciens et lorsque nous remonterons un set de groupe, nous saurons exactement ce que l’on en attend. Mais quand même, là, tout de suite, avec ses petits verres de vin, elle voudrait qu’ils soient là, à lui dire qu’elle boit trop, qu’elle risque d’oublier ses textes.


Elle me fait sentir depuis le début que je ne lui suffis pas ce soir, alors je panique un peu, je ne contrôle pas le son qui sort de ma caisse par le petit Phil (ou Jack je ne sais plus) avec lequel on m’a branchée. Pourtant pour elle, tout se passe apparemment bien. Les gens réagissent à chaque morceau. Marine est à l’aise, elle tente de nouvelles chansons, enchaîne les blagues (qui fonctionnent, une fois n’est pas coutume), le public la rappelle même. Inouï pour une première partie, on ne s’y attendait pas. Elle récolte les bravos, clap, clap, clap, signe des autographes… Et m’ignore complètement, l’ingrate. Soudain, je l’entends parler à l’ingénieur du son. Il paraît que mes cordes semblaient friser à cause d’un problème de micro-interne ou je ne sais quoi. Elle m’en veut. Je me fais toute petite. Elle va me renvoyer au magasin, d’où je viens, pour diagnostiquer mon problème.

Je ne veux pas me retrouver comme ce pauvre théâtre ou l’on n’a pas joué. Remplacée. Non, il faut qu’ils trouvent une solution. Pas d’ersatz de Corde sensible ou je lance une pétition auprès de mon demi million de lecteurs (oui toi). 
Une vidéo de fille perdue, pour la peine... Lost.

mardi 9 novembre 2010

Revanche underground


Vous le savez (pour ceux qui suivent mes posts depuis juillet = la majorité d’entre vous, public fidèle et ô combien aimé), Marine m’a déjà traînée dans le métro pour pousser la chansonnette. Nous avions alors subi un remake de Marche à l’ombre avec un collègue musicien nous expliquant que nos talons et petites chansons étaient bien gentils mais qu’ils nuisaient à son chiffre d’affaire (parce que jouer dans le métro avec LA carte officielle est un business lucratif, comparé au salaire minimum bolivien, disait-il). D’un commun accord - surtout de ma part, ayant bien noté le sort réservé à la guitare dans ledit film – nous avions donc déguerpi, le manche bas.

Et là, coup du sort… Cindy Godard, la bientôt célèbre créatrice de la marque de vêtements Dentelle & Macarons, nous offre une revanche. Elle organise une expo multi-arts dans une galerie éphémère, ouverte pour l’occasion par la RATP. Pour nous y rendre, il faut simuler une entrée dans le métro Palais royal et bifurquer juste avant les tourniquets vers un long couloir illuminé, ouvert à chaque extrémité sur le fascinant spectacle du va-et-vient des usagers. De part et d’autres de ce tunnel chic, des vitrines décorées de tableaux, photos, fringues, et animées par de jolies jeunes femmes suggérant de s’approprier quelques pièces. Blackout c’est le nom. Et jusqu’ici c’est plutôt sexy.

Marine et moi jouons à 17h. Un concert-goûter donc. Aussi peu rock n’roll que cela puisse paraître, sa veste en cuir et ma désormais célèbre sangle léopard ont suffisamment donné le change pour presque le faire oublier.
Nous nous produisons au bout du couloir. L’ingé son propose de faire tomber un rideau de fer derrière nous pour limiter les bruits du métro. Que nenni, nous voyons enfin notre revanche pointer son nez. Personne ne pourra nous déloger ici. Et que de chemin parcouru depuis nos premiers pas, station Odéon... La technique est du dernier cri : un tabouret de bar emprunté… au bar d’à côté, un pied de micro et micro (parce que l’un sans l’autre…) et des enceintes laissant échapper juste ce qu’il faut de larsen pour que l’ambiance underground soit respectée. Bref, nous exultons. Le public devant nous, attentif sur ses bancs d’écoliers, peut profiter de l’écran vivant dans notre dos, tandis que nous apprenons à jouer recto-verso.

Nous tentons de nouveaux morceaux, frais du matin comme des petits pains. Et des vieux aussi, parce que dans ce palais (royal) il n’y a d’autre règle que de faire ce qu’il nous plaît. Un couronnement pour nous, presque sorties du trou.

lundi 1 novembre 2010

Et ce salon du livre alors...? F. (journaliste)

Marine est une femme intelligente. De fait elle a écrit un LIVRE. Peu importe qu’il soit bien ou mal tourné, la plupart de ceux qui le supposent n’en ont pas la moindre idée. Mais le simple fait d’avoir son nom sur une couverture cartonnée te rend bien plus crédible que n’importe quel concert. Et pourtant… moi je connais la vérité. Je la supporte chaque jour. Et je peux vous dire que c’est moi sa part crédible, sa note boisée, son inspiration, son défouloir. Alors, sans vouloir me tirer toute la couverture, je mérite au moins autant qu’elle de siéger parmi ces gens INTELLIGENTS qui ont écrit DES LIVRES. Un salon leur est consacré au Mans. J’ai décidé de m’incruster pour combler les blancs et faire un peu swinguer ce monde de lettres (enfin si Marine a révisé la leçon 24 de la guitare pour les nuls qui chantent si fort que ça passe). 

Premier jour donc, nous nous retrouvons attablées avec Olivier Nuc et Bruno Lesprit, auteurs d’un livre sur le défunt Bashung. Autant dire que ma petite personne a été choyée. Tous se battaient pour me caresser les cordes. Marine m’a utilisée pour remercier les acheteurs de son livre, peu nombreux ce jour là malgré son idée de dédicace simultanée (pendant qu’elle rédigeait sa dédicace elle demandait à son futur lecteur de faire de même sur une feuille blanche). Le plus assidu des publics fut ce cher journaliste que nous nommerons F. (bien que J. eut été plus adapté). Nous n’avons tout d’abord pas bien compris pour quel média il travaillait. Un journal local ? Une radio ? Je ne me souviens même pas qu’il l’ait mentionné. Mais il avait UN BADGE, ce qui comme UN LIVRE, te rend respectable. Interview sublime à la Raphaël Mezrahi avec des questions pointues du type «parlez-moi de votre livre…» ou «alors les femmes… ?». Marine a fini par m’utiliser comme porte de sortie. On lui a joué Mens-moi en se disant que c’était certainement ce qu’il était en train de faire.

Il s’est ensuite tourné vers mes chers voisins et leur a demandé «parlez-moi de votre livre… » suivi d’un «et Bashung alors… » qui nous a plongés dans un fou-rire aussi étouffé qu’incontrôlable.
En partant, tandis que j’entamais un récital en espagnol, ce cher F. a pris un stylo et a noté sur ma feuille de signatures ce mot :
«I love you Marine Goodmorning.
F. (journaliste) »

La parenthèse était utile. Pour la crédibilité, puisque c’était le sujet du week-end.

Fortes du succès d’estime de notre hôte libraire, mes amis et moi avons été «promus» dans l’allée centrale le jour suivant. J’y suis pour beaucoup, car en toute modestie, sans moi (et les quelques verres de vin offerts par notre cher auteur local Alain Moro) l’ambiance aurait été beaucoup plus sage. Après une très courte nuit (la vie nocturne au Mans est complètement débridée au cas où vous en douteriez encore) nous voici donc chargées de la lourde responsabilité d’être auteur (pour elle) – divertissante (pour moi). Cela a apparemment fonctionné puisque nous avons quasiment écoulé notre stock de livres en une journée. En terme d’énergie dépensée, on a tout donné, tout chanté et tant parlé que l’on ne sait pas comment nos voisins ont encore pu nous supporter à leurs côtés sur les voies du retour. Dans le "train des auteurs" qui nous était consacré, nous  occupions un wagon avec nos nouveaux amis du week-end, revival de nos plus beaux trajets de fonds de bus adolescents. On a adoré cette plongée dans le monde merveilleusement sérieux du livre et recommençons quand vous voulez à jouer les intelli-chantes.


lundi 25 octobre 2010

Ces ondes qui font des vagues


Cela faisait des semaines que nous attendions les réponses des salles montréalaises pour qu’elles nous trouvent une place dans leur programmation avant la saint-Léon (le cousin du saint Glin-glin). Le problème avec la scène dynamique du Québec c’est qu’elle est… dynamique justement. Ce qui veut dire que les groupes se bousculent aux portillons de tous les lieux de concerts. Nous qui arrivions bouche en cœur et cœur en broche, pensant qu’il nous suffirait de quelques jours pour trouver où faire rugir mon impressionnante caisse de résonance, nous sommes heurtées à des réponses du type : «le 15 décembre ça vous irait ?». 

Et bien non évidemment. Le 15 décembre on aura déjà filé sous nos tropiques parisiens pour éviter l’hypothermie (parce nos chers québécois et nous ne sommes pas faits du même bois, c’est évident : le 1er octobre on claquait déjà des dents).

Je m’apprêtais à me résigner à ne me faire gratouiller que devant les feux de camps de nos amis, lorsqu’un événement majeur a changé la donne et subitement libéré les emplois du temps surchargés des salles : une interview à Radio Canada.

«Tu ne connais pas Christiane Charette. Enfin, elle est encore plus connue que le festival western de Saint-Tite» (petit raccourci dans la discussion je dois l’avouer, mais un blog se doit d’être concis m’a-t-on dit…). Toujours est-il que les quatre mots Radio-Canada-Christiane-Charette mis bout à bout, font un effet bœuf et que soudain les portes blindées se sont transformées en portes battantes. Nous avons donc donné un premier concert à l’Escalier, petite place aux allures de home sweet home, très sympathique. La salle était pleine (une double centaine de mains environ) et nous avions l’impression de jouer au milieu d’un salon. Hormis deux espagnols bourrés qui essayaient de séduire Marine en lui hurlant «te quiero» du fond de la salle, pas d’incident notoire. Ce fut même une très bonne soirée, terminée tardivement en chantant en allemand, c’est de coutume ici apparemment, enfin, nous on croit (encore) ce qu’on nous dit.
Une petite vidéo ici (pas des german covers, ce n’était plus l’heure…). 

Le deuxième et dernier concert de notre mini tournée canadienne s’est déroulé dans un pub qui porte bien son nom, le Saint-Ciboire. Assez difficile de jouer dans ce contexte, vraiment bruyant. Nous avions néanmoins l’honneur d’être accompagnées à l’alto par Jonathan Harnik. Cela m’a confortée dans l’idée que je me frotterais bien à d’autres cordes au retour en France. Je rêve à présent de rencontrer le violon de ma vie, puisque Marine m’a refusé la mandoline… (mais je ne renonce pas, rira bien qui jouera le dernier, hahaha).  Un grand merci à Jonathan en tout cas, qui nous a fait vibrer d’émotion.

Je vous quitte pleine de (breed)love sur la fameuse interview de Christiane Charette – qui n’avait de toute évidence pas lu le livre de Marine, mais peu importe, rien que pour la question sur l’accent de la Gaspésie cela valait le coup.
http://www.radio-canada.ca/audio-video/pop.shtml#urlMedia=http://www.radio-canada.ca/Medianet/2010/CBF/ChristianeCharette201009271008_3.asx 

mercredi 29 septembre 2010

Le marathon de Canton


Gare routière de New-York.
Conversation entre Marine et une dame qui ne parle pas fort derrière sa vitre de comptoir Greyhound… * traduit de l’anglais par bibi et ses cordes bibi-lingues
-          «je voudrais un billet pour Canton s’il-vous plait.
-          Où ?
-          Canton, dans le nord de l’état de New-York.
(elle écrit la ville sur un papier et nous le montre pour être certaine d’avoir bien compris).
-          Oui c’est ça.
-          Ah bon… Mais vous savez, c’est tout petit il n’y a rien à faire là-bas.
-          Je vais donner une conférence et faire un concert à l’université St Laurence.
-          Ah bon d’accord. Et vous venez de France pour ça ? C’est sympa de visiter le pays (comment sait-elle qu’elle est française… mouah, encore un sale coup de notre accent). 78 dollars s’il-vous-plait ».

1h du matin, Marine et moi sommes assises par terre, en partance pour la méconnue petite ville de Canton. 1h45, le bus démarre. Un voisin hawaïen à nos côtés qui file à Toronto entame la discussion. Évidemment nous devrions dormir pour nous préparer à l’intense journée qui nous attend, mais que voulez-vous, la parlotte et nous, on a une relation fusionnelle. 5h, sauvées par le bus, nous quittons le sien. Un changement de deux heures nous attend. Le moins que l'on puisse écrire est que l’on a…sommeil et que la délicieuse mini gare routière de Syracuse, si elle est riche de chaînes en tout genre (Dunkin donuts, Subways & co), n’a pas jugé bon de se doter de sièges confortables. Nous ne trouvons pour patienter que des fauteuils-grillages rouge, avec des accoudoirs empêchant toute tentative de colonisation du siège voisin. 

Alors que Marine commence à bougonner dans sa moustache (ben oui elle en a, ça c’est 21ème siècle), un spectacle inhabituel lui fait soudainement oublier ses rêves de matelas trois étoiles. Les Amish sont dans la gare, je répète, les Amish sont dans la gare. Pour ceux qui, comme moi, ignorent de qui il s’agit, les Amish sont une communauté d’anabaptistes (un courant né au 17ème siècle du protestantisme mais s’en étant détaché, trouvant que la modernité fait dériver la religion). Vêtus de couleurs sombres, tous quasiment à l’identique, ils portent des chapeaux de paille, rejettent la modernité (vivent sans électricité, sans voiture…), l’individualisme, prônent le rapprochement avec la terre (ils sont quasiment tous agriculteurs), sont très fervents dans leur pratique religieuse et ont fréquemment entre 8 et 10 enfants… (cf. http://www.participez.com/contenu/reportage/111).

Physiquement, ils semblent tout droit sortis du 19ème siècle. Autant dire qu’avec la petite casquette new-yorkaise et les chaussures bi-goût noir et blanches de Marine, on se sent quelque peu en décalage. Toujours est-il qu’en ce petit matin, ils s’apprêtent à prendre le bus, comme nous pour Canton. Et que l’un d’eux ose même faire jaillir une cannette de Coca du distributeur en nous balançant un clin d’œil impertinent. Tout fout le camp, je vous dis…
Malgré notre grande curiosité à leur égard, à peine montées dans le second bus qui nous conduit enfin à destination, on s’endort pour les trois heures qu’il nous reste, affalées en travers d’une rangée de siège (effectivement, peu de gens semblent se rendre à Canton…).

A l'arrivée, Natalia, professeur d’anglais et organisatrice de l’événement, nous accueille. Elle nous offre un petit déjeuner (avec triple café pour faire face) et nous annonce le programme de ces deux journées. A 16h, nous sommes invitées à une tea-party par des étudiantes. A 18h, nous passerons à une Wine & cheese party organisée par les professeurs, à 19h : balances, 19h30 : début de la conférence, 20h30 : petit concert acoustique, 21h :  cocktail signature de livres et disques, 22h : soirées organisée en notre honneur chez Natalia. Le lendemain matin, intervention de 2h dans les classes de français avancé, puis retour au Candada.


Je me plais à penser qu'à côté de cet emploi du temps, un ministre en fonction doit faire figure de vacancier… Nous reprenons une dose de café, une douche (parce que oui, nous français, nous douchons, contrairement à la réputation qui nous colle aux converses) et c’est parti pour une journée sur les chapeaux de roue. Une journée... fantastique (et je pèse mon superlatif).

Quelques 300 étudiants sont venus à la conférence, réagissant avec passion aux messages des 81 femmes (cf. le livre Same same but different que Marine est venue défendre). Certains sont même venus lui parler en larmes de leurs propres rêves et de ce qui les empêchait encore d’oser les entreprendre. Le concert -en français- a reçu un accueil très enthousiaste au point que nous avons regretté de n’avoir pas chargé notre valise de plus de disques (parce qu’il en reste tout de même plus d’un millier sous la table de cuisine de Marine).

Bref, c’était l'un des plus jolis événements auxquels mes cordes aient assisté. Juste avant de quitter cette chaleureuse université, alors que je suis allée jouer quelques morceaux dans les classes de Français, j’ai même eu la surprise de constater que les élèves avaient travaillé les textes de nos chansons.
Canton vous dit que la valeur n’attend pas le nombre des habitants… Big up St Laurence, on repart avec tous vos sourires dans nos bagages.


samedi 25 septembre 2010

Ce qu’il faut pour faire la peau à un rhume en 24h chrono / Heal the nose… make it a better place…

New-York, New-York, New-Yoooooooork ! Enfin j’accomplis mon destin de guitare folk et retourne sur mes terres d’origine. Marine entend quant à elle son nom prononcé partout. Parfois même - comble de son égo-trip - il lui est adressé. Good morning donc chers lecteurs. Nos «mornings» américains ont pour le coup, été plus que bons. Le hasard a fait que Dan Laurens, un de nos ami guitariste, se trouve à Manhattan au même moment que nous. Apprenant notre venue en grande pompe (41 pour elle), il nous a invitées à jouer avec lui. Vous vous doutez bien que nous avons sauté sur l’occasion… 

Jusqu’ici tout s’annonce pour le mieux.
Sauf que, comme de coutume, Marine a un peu trop traîné ses jupettes sur les trottoirs de New-York et abusé d’allers-retours dans un métro aux températures yoyo (sorte de sauna dans les couloirs et de frigidaire dans les rames…). Effet immédiat : le jour J, un joli rhume lui racle la gorge et le nez. Dès le petit matin, nous décidons donc d’entamer une multi-thérapie alimentée au fil de la journée de toutes les idées de nos rencontres plus ou moins fortuites (et farfelues).

Joseph-Pierre, l’ami qui nous héberge dans l’Upper west side, est adepte de l’homéopathie. Gouttes de cuivre, d’argent dans le nez… dès le lever en pyjama à pois, il nous couvre de métaux précieux pour enrayer l’infection. JP nous conseille ensuite de passer une journée tranquille à les laisser infuser dans nos narines depuis le haut d’un building de Chelsea. Prêtes à tout pour assurer ce soir, nous suivons donc ses recommandations et grimpons les 18 étages de cet hôtel appelé à injuste titre « le Standard ». Du haut du bar qui le surplombe, la vue sur la ville est sublime. L’Hudson coule tranquillement à gauche, tandis que le vivant quartier de Meatpacking s’active dans l’alignement du bar, juste derrière le serveur, qui nous fait sursauter en demandant à Marine ce qu’elle aimerait boire. « Un thé… non, c’est un bar de nuit… donc de fête… donc d’alcool… Bon, un jus de fruit alors, vous en avez forcément pour faire les cocktails j’imagine… Bien sûr. Qu’est-ce qui vous ferait plaisir ? Ce que vous voulez, quelque chose qui soulage la gorge… Blablablabalablabla (réflexion – tergiversations)… ok, un cocktail aux fruits rouges et orange pour les vitamines ». Le serveur prétend y plonger toute son énergie, sorte de fruithérapie. Il fait cadeau de sa préparation à Marine (qu’il a l’air de trouver à son goût malgré son nez imitation clown), puis lui conseille de monter sur la terrasse extérieure.

Ha… ce n’était donc pas ici. Encore quelques marches et nous y sommes. Pas loin du paradis ou du septième (gratte) ciel. La vue est exempte de vitres, le sol couvert de gazon, des lits à eau posés ça et là invitent à une sieste au soleil, parfaite pour la luminothérapie (d’autant plus que la température avoisine les 35 degrés en cette journée de septembre). Marine s’apprête à un repos de circonstance, lorsque la seule personne présente s’approche et entame la conversation d’un original « hi, how are you doing ? ». Il m’a vue, posée dans un coin, et en profite pour orienter la discussion sur moi. Facile, me dis-je. Marine explique que nous jouons ce soir et qu’elle tente de calmer l’angine qui la démange. Un sourire éclaire le visage de l’homme en question (Peter, from San Francisco, pour les adeptes des précisions). Il est physiothérapeute, nous sort sa carte en guise de presque preuve, et propose de lui soulager la nuque et ainsi, la gorge, par un moyen détourné. Pourquoi pas c’est la journée des multi-thérapies, alors soit, allons-y pour la phase 3 du traitement : la massothérapie. Il y a des jours comme ça où tout tombe à pic.

Nous quittons l’hôtel détendues et un peu hallucinées d’y avoir trouvé tant d’attention en cherchant seulement un coin loin de l’agitation urbaine…
Direction Central Park où une séance de musicothérapie nous attend (une répète quoi…) avec le fameux Dan Laurens. Devant un coucher de soleil aux allures de tableau, il nous accompagne sur nos nouveaux morceaux. Je suis un peu jalouse de la dextérité avec laquelle il masse les cordes de ma rivale : une autre guitare made in USA. Mais peu importe, je ravale mon irritation et me concentre sur le concert de ce soir, professionnalisme oblige.

A la nuit tombée nous quittons le parc, en nous y perdant juste assez pour arriver (avec le retard qui nous caractérise) au lieu dit : un bar à vin aux murs de briques rouges au cœur d’East Village. Marine a une nouvelle chapka sur la tête, j’ai toujours ma sangle panthère, Dan a ses cheveux en mode super volume live, et sa guitare a la simplicité de celle que l’on vous prête à la dernière minute. On s’installe rapidement, Marine entame la dernière phase du traitement, la vinothérapie et hop, c’est parti pour une heure quinze de concert. Sans toux, sans reniflement impromptus, et avec la joie d’improviser un set acoustique avec ce formidable ami et musicien. En même temps si le rhume avait tenu tête à ce multitraitement de choc, il aurait été décoré de l’ordre des microbes résistants. Il pouvait toujours courir les bronches pour qu’on lui fasse ce plaisir. Et hop. Bye bye american cold. And good morning New-York… On est fan de toi, déjà.

mardi 14 septembre 2010

"Tu connais-tu...

...le festival country-western de Saint-Tite ? Non ? Pour vrai ? Faut qu’tu y aille j’te jure, tu vas capoter ben raide, c’est l’plus gros du Canada»  Phrases entendues au hasard d’un cours de guitare*

Si nous avons traversé l’océan pour nous rapprocher du monde des cowboys, nous pouvons bien traverser la Mauricie pour le toucher du doigt. Quoi que ce soit l’inverse en ce qui concerne Marine (cf. ce joli tatouage improvisé sur son presque-sein par un cowboy superstar après le rodéo).

Avec François Bernier, notre meilleur ami du Québec, nous enfourchons donc Serpanthère, notre monture à quatre roues (mais l’année prochaine on aura une vraie moto de cowboy, ou un cheval, ou une caravane, ou un mobile-home-bus, un vrai truc de country quoi). On rempli le coffre de bière, on trouve des chapeaux adaptés (puisque dans les ruelles de St Tite, le taux de portage est proche des 99%, rapport au soleil surement), Marine revêt sa robe-nappe à carreaux et hop hop, on infiltre ce monde
parallèle.

Ici point de tong (ce qui au passage en québécois veut dire string, gare au malentendu si l’on demande à quelqu’un de l’enlever), mais des bottes pointues à tous les coins de rue. Pas de tecktonik mais de la danse en ligne dans la country-thèque. Des rodéos sur chevaux sauvages, du sauvetage, des taureaux en furie, des hommes à la ceinture de bière qui te pleurent sur l’épaule en te parlant de leurs déboires conjugaux, des gros moteurs, des gros colons parfois (chercher la définition québécoises sur les photos). Bref, une sorte de Disneyland à franges qui nous a captivées, capturées en un coup de lasso.


*(note pour plus tard : vous parler très vite de ces cours de guitare, qui en eux même valent bien un détour de clavier).

mercredi 8 septembre 2010

30 millions d'amis?

Dix jours sans nouvelles… Pourquoi, comment se fait-ce? Et bien c’est le temps qu’il fallait pour s’acclimater à la fin d’été-giboulée du Canada (et trouver un chapeau de cow-girl pour elle, une sangle panthère pour bibi, adaptation oblige). L’année dernière, Marine y était partie trois mois sans moi, et c’est là qu’elle s’était dit qu’il était plus que temps de remédier à mon absence. 

Retour ici donc pour montrer ses (nos) progrès aux écureuils, public aussi fuyant qu’exigeant. Avant de «performer» devant les québécois, ils sont une sorte de passage obligé. Tradition méconnue, puisque les caribous et castors ne cessent de leur voler la vedette en tant que critiques des grandes étendues. Verdict pour le moins encourageant : ils restent et dressent même leur jolie queue en signe d'approbation. Allez, demain, on teste les pigeons...


A croire que le succès nous submerge puisqu'alors que l'on posait l'air de rien (en mode soooo melancolique) une sorte de Lassie des rues est venue troubler notre attitude détachée. L'homme est un animal comme les autres à ce qu'il paraît, espérons que nous saurons aussi bien l'apprivoiser sur la scène locale...

mercredi 25 août 2010

Sur le banc


Passage éclair à Paris pour dépaqueter les tongs de Mademoiselle, sortir ma housse d’automne, me dépoussiérer le cordage et… passer à la radio. Sur une station intelligente, oui monsieur, sur France Culture. J’aime bien le nom de l’émission aussi : Sur le banc. Ca me parle ça, c’est vrai que la vie est faite d’une succession de bancs. Le banc du parc où l’on te surveille du coin de l’œil quand tu en es encore à marcher tout banc-al, le banc de l’école où tu rêvasses, le banc des accusés (je vous ai racontés déjà, non ?), les dé-banc-dades quand tu t’enflammes d’un battement de cil, les bancs de mariage quand tu te résignes (ou là là c’est moche cet esprit désabusé… mea culpa, je gomme), la banqueroute qui nous guette nous les musi-bohémiens, le banc d’un métro qui nous a fait traverser tout Paris avec Marine sur talons hauts (puis pieds-nus sur le trottoir tant ses orteils récalcitrants font de la résistance) … et celui de la maison de la radio où je me demande à quelle sauce je vais être jouée.

Tiens, on commence par moi pour une fois. Je m’accorde à faire mon mieux et interprète deux de nos chansons. Hop hop dans la boîte et blablabla, elle parle et ça donne ça :

 http://www.franceculture.com/emission-sur-le-banc-sandra-reinflet-2010-08-23.html

dimanche 22 août 2010

Le GPS c'est complètement has been

Pour faire Barcelone – Paris on peut :

a) Prendre un vol low-cost orange (cf. article du 7 août). Durée moyenne : 3h
b) Prendre un train de nuit et roupiller bercés par l’odeur délicate des pieds de notre voisin d’à côté (puisque évidemment ses petons taille 46 pendouillent au milieu du couloir). Durée moyenne : 11h
c) Faire du covoiturage et en parler pendant la moitié du trajet (puisque cette pratique écolo est tout de même notre principal point commun). Durée moyenne : 10h
d) Faire Barcelone-Aix en voiture, Aix-Nice puis Nice-Cannes en train, Cannes-Aix en covoiturage, Aix-Royan en voiture, Royan-Saumur puis Saumur-Paris en train. Durée moyenne : 34h

Vous vous doutez bien qu’en toute logique nous avons opté pour le dernier choix. Notre amie Camille, organisatrice du Busker’s festival, quitte Barcelone avec sa jolie Twingo rose, après six ans de relation fusionnelle. Mes cordes, Marine et moi avons donc décidé de la soutenir un peu dans cette épreuve. Nous lui avons écrit une chanson tout d’abord (vidéo dans le post du 10 août), avons chargé son coffre (enfin surtout elle) P et avons embarqué pour un Road-trip en zigzag.

Après six heures d’embouteillages entre Barcelone et Aix, dont quelques balades à pieds sur l’autoroute, une petite danse improvisée sur The time of my life dans une station service, Camille nous lache à Aix TGV pour le week-end. RDV lundi matin. D’ici là je fais ce que je veux (enfin surtout ce qu’elle veut puisque malheureusement je n’ai pas vraiment ma note à jouer)… Nous avons hésité longtemps, mais finalement, sommes parties à Nice retrouver des amis et prendre un peu de soleil… C’est ce que je pensais jusqu’à ce que samedi matin, une pluie torrentielle nous réveille. Il paraît que cela arrive trois jours dans l’été. C’est plus rare que les feux d’artifices, mais chanceuses que nous sommes, NOUS Y ETIONS ! En même temps, heureusement. Le soleil, la peau bronzée et luisante, c’est dépassé tout cela, c’est comme les GPS.

Oui, parce que ma chère co-pilote et moi-même nous retrouvons donc comme prévu lundi matin pour rejoindre Royan, où nos chemins doivent se séparer. Après 4 petites heures de sommeil, nous nous apprêtons à passer une journée merveilleuse ensemble, à surfer sur le bitume, guidées par une carte du 20ème siècle où les autoroutes sont encore tracées en pointillés. Début du périple, un retour du 15 août sur l’A8. Verdict : 4 heures pour faire Aix-Montpellier. Aventurières dans l’âme, nous bifurquons vers Millau. Quitte à ne pas avancer, autant que le paysage soit joli (souvenez-vous de cette merveilleuse chanson de Barbelivien, «quitter l’autoroouuuute… » , n’oublions pas qu’il s’agit d’un blog à vocation musicale;).

A nous les petites pauses barbotage au bord des lacs, les petites pauses déjeuner, les petites pauses pipi, les petites pauses goûter, les petites pauses essences, les petites pauses photos, on fait des pauses, des petites pauses, encore des petites pauses… Verdict 2: 14h de route pour rejoindre Royan, de nuit, crevées mais mortes de rire. A défaut d’avoir le sens de l’orientation, nous avons le sens de l’humour, et ça, ça vous sauve un road-trip. 

à 16h, on a un peu appuyé sur le champignon...
Et puis, il y a eu une montée...

jeudi 19 août 2010

À l’abordage avec Jack Sparrow

Deuxième jour au Busker’s festival. Nous partageons l’affiche avec Solrise, un groupe qui fait à peu près la même chose que nous (soit un reggae rock roots). Ils ont un matériel de pro, une énorme banderole exhibant leur nom et des enceintes qui envoient la purée (le bois, ou je ne sais quoi, mais qui l’envoient loin). Marine et moi nous sentons un peu seules au milieu de tout ça, mais au moins le son est-il excellent. Pas mal de gens s’arrêtent pour nous écouter. Parmi eux, un monsieur tout nu qui se plante devant nous comme si de rien n’était (test de concentration ultime), un fan qui a fait s’éterniser une séance photo pour le plaisir de coller sa joue luisante le plus longtemps possible contre celle de Marine, des grand-mères qui hochent la tête en signe d’approbation (rock n’roll), des punks qui passent leur chemin sans un battement de piercing (pas rock n’roll) et notre fan numéro un, un beau conducteur de taxi-vélo qui a assisté à nos trois sets en entier (et comme il est tatoué de partout, cela nous fait repasser du côté rock n’roll). Un joli moment donc, avec qui plus est, un vrai pied de micro… Grosse évolution technique nous permettant de nous déhancher un peu, sans toutefois arriver à la cheville du chanteur qui nous précédait.

Ce sosie de Johnny Depp dans Pirates des caraïbes a en effet enflammé la Rambla à coup de danse suggestive. Après le concert et quelques verres, il était un peu moins glam (cf. photos by night). Ceci dit, ayant nous aussi terminé assises sur un trottoir comme les adolescentes attardées que nous sommes (parfois/rarement), nous serions malvenues de nous en moquer. Du coup le lendemain, nous décidons de laisser une nouvelle chance au capitaine de notre soirée. Verdict : 4 jours à dessiner, gratouiller et chanter avec lui. Preuve qu’entre Marine et le reggae, il n’y a qu’un papier de cigarette roulée. 

Pendant...

Après...
Et d'autres photos du festival en vrac

Et notre ami Tim, public assidu et fervent défenseur de la cause animale. Il nous aura presque rendues vegan (deux jours).